Trouble Audition/Langage
Nécessité d'une rééducation auditive
Malgré l’évolution constante et très positive des appareils de correction auditive de ces dernières années, nous constatons régulièrement que les bénéfices qu’en tirent nos patients ne sont pas immédiats, voire tardifs avec une forte corrélation au degré de surdité et à la durée de privation sensorielle. Les explications à cette problématique sont multiples et bien connues, la principale étant la plasticité cérébrale.
Le cortex auditif se réorganise en fonction des stimulations. La plasticité cérébrale, dans le cadre d’une déficience auditive périphérique, réorganise la tonotopie cochléaire de sorte que les neurones originellement affectés à des zônes de fréquence non stimulées sont réaffectés à des fréquences perçues. En défaut de codage du message sonore, la plasticité peut altérer temporairement la capacité de réponse aux signaux auditifs absents. Cette détérioration n’est pas irréversible. Une fois la perception de ces signaux restituée, un entraînement auditif pourra provoquer la réorganisation de la partie du cortex concernée.
La technologie la plus avancée opérant au niveau périphérique, ne peut suffire à compenser les limitations dues à un système auditif central peu performant. On comprend pourquoi les aides auditives les plus évoluées ne peuvent à elles seules restaurer une audition pleinement satisfaisante et pourquoi la discrimination de la parole, qui fait appel à des compétences d’analyse fine peut demeurer lacunaire.
Nourrir l'oreille de l'enfant
De la même façon, le cortex auditif d’un enfant né sourd profond se voit moins sollicité que celui d’un enfant entendant et par conséquent les mécanismes de reconnaissance et de discrimination se développent moins bien. Or la plasticité du cerveau en cours de développement est remarquablement plus performante que celle du cerveau adulte. On comprend l'importance cruciale d'un appareillage précoce et d'une stimulation auditive intensive. Il faut “nourrir” l'oreille le mieux possible pour développer les capacités auditives du cerveau.
Les aides auditives vont permettre aux enfants atteints de surdité sévère ou profonde de s'approprier une partie de l'univers sonore et cela de façon progressive. Cependant, les limitations des champs fréquentiel et dynamique induisent des distorsions et réduisent le pouvoir d'analyse des structures fines. Les stimulations sonores quotidiennes sont donc moins identifiables spontanément et demandent un acte volontaire de décodage jusqu'à ce que les processus d'identification et de mémorisation soient durablement fixés corticalement. C'est la raison pour laquelle il est important de renforcer ces processus d'acquisition par des apprentissages structurés, et ce d'autant plus que la surdité est importante.
La confrontation des expériences acquises par de nombreuses équipes pluridisciplinaires travaillant avec des enfants sourds appareillés a permis de mettre en évidence, « à gain prothétique égal », à quel point les performances d'un enfant bénéficiant d'une éducation auditive méthodique et régulière pouvaient se distinguer de celles d'un enfant ne profitant pas d'un tel soutien.
S’il est mené de manière ludique, le travail d'entraînement auditif provoque non seulement des progrès sensibles des performances auditives mais induit de manière plus ou moins consciente un regard positif sur les appareils eux-mêmes qui donnent accès au jeu et autorisent ces progrès. Ainsi l'intérêt de l'enfant pour le port des appareils s'en trouvera renforcé.
Si les bons résultats prothétiques observés généralement dans les cas de surdité moyenne favorisent l'acceptation au point que parfois l'enfant lui-même réclame ses appareils, dans les cas de surdité sévère ou profonde, le bénéfice procuré par les appareils n'apparaît pas immédiatement. Il faut du temps et du travail pour que les premiers progrès sensibles apparaissent. Les professionnels le savent par expérience mais la famille, elle, n'en a pas la preuve et doit être soutenue concrètement pour éviter le découragement.
Il est également essentiel de pouvoir établir rapidement, au cours d'une période-clé de son développement, un bilan des compétences auditives de l'enfant, de ses possibilités mais aussi de ses limites. Ces bilans permettront de valider l'adéquation des choix prothétiques et pédagogiques et, éventuellement, réorienter la stratégie de correction de l’audition vers d'autres choix comme celui de l'implant cochléaire qui s’impose lorsque les résultats obtenus avec des aides auditives conventionnelles se révèlent insuffisants. Une stimulation précoce et régulière de la fonction auditive dans le cadre familial et professionnel contribue à apporter des réponses plus rapides à ces questions.
Conscients de la nécessité de l'éducation auditive, de l'intérêt des technologies multimédias dans ce contexte et de l'absence de matériel éducatif véritablement adapté à la déficience auditive, nous avons entrepris de développer des logiciels multimédias dédiés tant pour l'usage professionnel que pour l'usage familial.